jeudi 13 septembre 2012

A propos de morale laïque à l'école (2)

Frères et soeurs, je vous ai menti. En fait, ce n'est pas le débat sur la morale laïque au bac qui a provoqué chez moi cette irrépétible envie d'y aller de mon propre couplet sur le sujet. C'est le résultat d'une enquête qui semble prouver qu'après les petits Japonais, nos enfants de France sont les plus malheureux à l'école. Et ça, sérieusement, ça m'éneeeeeeeeeerve. Il n'est plus le temps de rigoler d'un air niais devant les ravages du manque de sens social de nos compatriotes. Bien sûr que le retour d'une courtoisie élémentaire serait le bienvenue dans notre société où le sourire et le bonjour sont suspects. Mais peut-on raisonnablement confier le soin de sauver la fraternité républicaine à une institution incapable d'assurer la joie de ses petits membres, puisque le but de toute morale est de faire parvenir l'être humain au Bonheur ?

Mais fi de toute envolée lyrique... Après le Titre premier : Les règles élémentaires de politesse, poursuivons la présentation de mon programme à moi pour le cours de morale laïque...



2) Les qualités humaines fondamentales

Le problème de cette partie du cours de morale laïque, c'est que pour être efficace il va mettre le système en porte-à-faux. Je préviens, il faudra la faire intervenir le plus tard possible, à peine de mettre fin aux syllogismes scolaires les plus évidents, ces syllogismes qui sont de ceux qui maintiennent la paix sociale comme : si tu travailles bien à l'école tu gagneras beaucoup d'argent (si si, on l'entend encore celui-là...).

Donc, les qualités humaines fondamentales... Dressons une liste. Ayé, je vois revenir les cathos avec leurs vertus théologales et cardinales. BOUH ! On vous a dit morale "laïque" !!!! Donc, allons chercher chez Aristote les qualités non corrompues par Thomas d'Aquin : la bonté, la compassion, la sincérité et l’honnêteté.

La bonté
En contestant pour de nobles raisons l'idée de l'existence de quoi que ce soit de "normal", on a provoqué aussi la disparition de toute notion partagée de "bon". Sauf pour les bonnes notes, certes. Cela étant plus personne ne se pose la question de ce qui est globalement bon, mais seulement de ce qui est "bon pour moi". C'est plus facile, "ce qui est bon pour moi", c'est ce qui satisfait mes besoins. Donc, on a pris l'habitude de recevoir du bien, pas d'en donner. Avec par ailleurs une grave remise en question autour du "c'est pour ton bien" de nos grands-mères qui nous a conduit à ingurgiter des aliments au goût détestable ou pire encore de la soupe sans pour autant grandir de manière démesurée... #mensonge

Ce ne sera donc pas l'argument du cours de morale laïque. Il ne s'agira pas d'apprendre à recevoir de bonnes choses, mais d'apprendre à en donner. De manière très basique, avec le consensus mou médiatique, on pourra en plus convenir de ce qui est vraiment bien, et de ce qui est vraiment pas bien. Du coup, on apprendra à donner de l'amour et ça finalement, c'est pas si mal. (depuis le Planning familial on me crie attention, se donner de l'amour d'accord, mais de manière responsable).

La compassion
Oui bon... On sera forcément rattrapé par la mode de la communication non violente. Du coup, s'adresser à quelqu'un deviendra d'abord l'écouter. Cela dit, ça marche pas mal. Les beaux parleurs n'emballent jamais les jolies filles en réalité. Les hommes qui ont le plus de succès sont ceux qui les écoutent. Mais, je ne sais pas si Barney Stinson serait d'accord pour que l'Education nationale diffuse son conseil #1 pour ne pas être célibataire...

Mais ce n'est pas le propos, surtout à la maternelle. A la petite école, on pourra gagner du temps sur ce thème, car les pleurs d'un enfant sont communicatifs. Du coup, l'idée qu'ils prennent ainsi une part de la souffrance de leur camarade est plus facile à faire comprendre. Enfin, on verra. En outre, on veillera à étudier les formes adultes de compassion (condoléances, empathie...) lesquelles n'incluent pas d'observer les candidats des émissions de téléréalité musicale, prompt à hurler leur feinte souffrance sur des airs aux mélodies discutables.

La sincérité
Quand j'étais petit, on apprenait à dire la "vérité". Mais aujourd'hui c'est trop compliqué. Nous sommes en effet passés dans une époque ou le pluriel s'est imposé, les vérités sont devenues successives (ce qui compte, ce n'est pas de dire ce qui est vrai, c'est que ce qu'on dit soit vrai au moment où on le dit. Peu importe si ça dure pas).
On parlera donc plutôt de sincérité, c'est plus accessible. En effet, on peut se tromper sincèrement, tandis que si on dit la vérité... enfin vous voyez ce que je veux dire. Mais il ne s'agira pas de donner les clés aux enfants et aux jeunes pour qu'ils puissent pratiquer le mensonge acceptable... non car après la sincérité viendra le chapitre sur l’honnêteté.

L’honnêteté
Pour les plus jeunes, être honnête cela veut dire "ne pas tricher". Le problème avec cette partie du cours, c'est qu'elle implique une ingérence de l'Education nationale dans les fédérations sportives, et notamment celles des sports les plus médiatisés... qui ne devront plus l'être jusqu'à intégration par les générations futures des principes de la morale laïque. Oui, comment tenir les enfants si leurs héros sont montrés régulièrement en train de manifester par leur attitude et leur comportement le contraire de ce qu'on leur enseigne ?
L'un des autres avantages de ce chapitre est qu'il contribuera efficacement à lutter contre la surpopulation carcérale, si les médias se donnent la peine d'être discrets sur les succès remportés par des personnes usant de procédés malhonnêtes.

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Marc Guidoni