samedi 11 septembre 2010

La France malade de l'école

Le 7 septembre dernier, une petite semaine après la rentrée, le journaliste américain Peter Gumbel, déjà connu pour avoir dénoncé le French Vertigo (ou comment le coq gaulois a fait place à une poule mouillée), récidive dans sa critique de notre vision du monde en publiant ses constats sans illusion sur le système scolaire français : On achève bien les écoliers. Un système dont il n’a pas qu’une connaissance livresque, puisqu’il a lâchement abandonné ses deux filles à l’école de notre république … La question fondamentale qui anime son livre ‘on achève bien les écoliers’ est ainsi « Pourquoi la France est-elle le seul pays à décourager ses enfants au nom de ce qu’ils ne sont pas plutôt qu’à les encourager en vertu de ce qu’ils sont ? ». Je vais encore me faire des amis...
Des constats sévères

« Comment est-il possible que quatre écoliers sur dix sortent du CM2 avec de lacunes graves en lecture, écriture et calcul ? Que 130 000 jeunes quittent l’école chaque année sans diplôme ni qualification ? Que, dans un pays obsédé par la notion d’égalité, les jeunes dont les parents sont travailleurs indépendants, cadres, enseignants ou issus des professions intermédiaires, aient deux fois plus de chance d’accéder à l’enseignement supérieur que les enfants d’ouvriers et d’employés ? »
  • 71 % des élèves en France sont régulièrement « sujets à de l’irritabilité » ;
  • 63 % souffrent de nervosité ;
  • Un sur quatre a mal au ventre ou à la tête une fois par semaine ;
  • 40 % se plaignent d’insomnies fréquentes.
Qui ne reconnaît pas ses enfants scolarisés dans ces quelques observations ? Selon Peter Gumbel, au-delà des débats qui agitent sans cesse le monde scolaire, nous passons tous à côté d’un élément clé, responsable de manière prééminente sinon à lui seul du conflit permanent école / société : la culture de la négativité. Notre système souffrirait d’une approche éducative hors d’âge basée sur l’humiliation, remplacée dans la majorité des pays voisins par une vision plus positive basée sur l’encouragement.

Alors j’entends déjà hurler les contestataires du pédagogisme. Il ne s’agit pas pour Gumbel de critiquer des méthodes d’enseignement, il ne s’agit pas de dénoncer les postures d’autorité, ou leur abandon au profit d’une classe sans repères, ni la méthode globale ou la méthode syllabique… C’est bien plus fondamental. Et, rentrant d’une réunion de parents d’élèves, je viens de m’en assurer …

Quelques extraits

« L’école est bien plus qu’un lieu où les enfants viennent apprendre ; dans l’Hexagone, elle incarne les valeurs les plus chères à la société. Il est impossible d’ignorer le sentiment de fierté nationale qui repose sur le fait que l’école est gratuite et laïque. Impossible aussi de ne pas être impressionné par l’idéal méritocratique selon lequel n’importe quel enfant issu de n’importe quel milieu, peut, en théorie, intégrer les plus hautes sphères de la société française en excellant à l’école. »

« Dans chaque pays que je connais, l’éducation est un sujet qui fâche, qui inquiète, qui préoccupe, mais il n’y a qu’en France qu’elle est une véritable obsession. […] Trop souvent hélas, ce débat se réduit à une joute absurde, opposant des idéologies contraires, entre « républicains » et « pédagogues », entre ceux qui veulent mettre le savoir au cœur du système et ceux qui veulent y mettre les enfants. Pour un observateur étranger, ce qui frappe en France dans ce débat, c’est son caractère conflictuel, et sa déconnexion de la réalité du terrain. Trop souvent, cela s’apparente à une vulgaire bagarre dans une cour de récréation où l’objet pour lequel on se dispute n’a en réalité jamais existé. »

« Ce débat franco-français néglige ou ignore une caractéristique qui saute aux yeux de n’importe quel étranger qui découvre les écoles françaises: la dictature de la salle de classe. Une culture impitoyable et parfois humiliante, qui a sacralisé des évaluations mettant les élèves sous-pression, tout en traitant sans ménagement la notion de motivation individuelle. Une culture de l’excellence, certes, mais qui enfonce aussi les élèves les plus faibles plutôt que de les aider à se relever. Une culture qui n’hésite pas à mettre 0 à une mauvaise copie, mais ne mettra jamais 20 sur 20 à une excellente. Bref, une culture de la nullité, à l’opposé des grandioses promesses de la République. »


Ce n’est pas sans rappeler la fable des animaux à l’école… 

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Cordialement,
Marc Guidoni