mardi 16 mars 2010

Complainte résignée d’un ex- 'électeur motivé'

J'ai lu, entendu, et constaté des choses surprenantes dans les commentaires des résultats du premier tour des régionales. Et notamment une belle leçon de démocratie donnée à ceux qui, si nombreux, l'ont foulée aux pieds en ne se rendant pas aux urnes. J'ai lu aussi quelque part combien voter est un devoir, et vu relancer le débat sur le vote obligatoire. Je ne me joindrai pas eux, ni à ceux qui rappellent ici et là que les régions sont devenues des actrices majeures du développement de notre pays. Car j'ai découvert au hasard sur twitter qu'il fallait se rappeler que voter est un droit, celui de choisir ses représentants, ses responsables.


Cela dit, quel choix nous offrait donc ce scrutin ? C’est un peu comme l'équipe de France de football, résignée par sa fédération à supporter Domenech. En effet, la classe politique nous condamne à choisir nos héros parmi ses hérauts, si occupée à s'élire elle-même qu'elle en oublie le peuple. Tous sélectionneurs de l'équipe de France, mais la liste des 23 est établie par Raymond. Tous électeurs ... tous électeurs.

Il y a quelques années, touché au cœur et au ventre par l'arrivée du Front National à la Mairie de Toulon, j'ai développé une métaphore, que ma situation actuelle rend cocasse (j'écris depuis un tgv arrêté en rase campagne depuis deux heures suite à une panne de moteur). Peut-être n'est-elle plus originale, mais tant pis, je vous la livre. Rajeunie. (le texte d’origine est paru dans un journal satyrique local, évoquant sans son titre un génie de la mer mondialement connu dans le Var, grâce au soutien et à la cosignature de mon ami Yves, que je salue au passage).

« La République serait un train. Inutile de préciser qu'il s'agit du fleuron de nos services publics ou un tortillard de l'arrière pays. C'est un train, donc, avec sa locomotive, son wagon de première classe, et son wagon de seconde classe. La vie démocratique consiste pour le peuple à choisir son chef et ses représentants : dès lors, s'agit-il pour nous de remplir ce train ou de désigner le conducteur de sa motrice ? Les citoyens surpris entendent les partis répondre haut dans les journaux : 'remplir le train' !

« En effet, et la suite est facile : la première classe, c'est la majorité. Est-elle heureuse de son confort, des services proposés, du calme propice au travail qui règne dans son ambiance feutrée ? Non : elle se déchire. C’est à qui aura le siège fenêtre et qui aura le siège couloir ! (reprenez la presse de 2007 qui relayait la déception des élus proclamés responsables de la victoire du Président devant la politique alors séduisante d'ouverture) Ce faisant, ils en oublient que l'un d'entre eux est destiné, selon les lois démocratiques, à devenir le chef de train. Et le temps passe, au son de leurs regrets de ne pouvoir réformer en paix. Ils regrettent le temps où derrière Rousseau, les minorités se rangeaient aux majorités les remerciant de leur montrer la vérité.

« La seconde classe, c'est l'opposition. Des désaccords du même type qu'en première existent, rassurez-vous. Mais tous sont capables de réunir leurs forces et leurs moyens pour réaliser une ambition commune : gagner la première classe. Cela demande opiniâtreté et résistance. Autant d'énergie qui fera défaut une fois de l'autre côté pour prendre place au poste de conduite. Hélas !

« S'il y avait une troisième classe, ce serait la nôtre, la place du peuple traîné bien malgré lui par ses augustes édiles sur une voie tracée depuis ailleurs. »

Dans le contexte toulonnais, j'achevais cette fausse légende en constatant que la vitesse inconstante du train avait permis au représentant d'un parti habituel refuge de la contestation de grimper en marche dans la motrice déserte, heureusement sans compétences pour conduire le peuple vers l'extrémisme. Ni ailleurs, ce que la ville paie depuis lors. Et cela par la faute d'une triangulaire imbécile, où chacun tenta de préserver sa place. La Constitution nous évita en 2002 le même scénario. Mais pas les mêmes déceptions.

Tout ce qu'on peut espérer pour aujourd'hui, c'est que personne ne profite du rythme de ce train, à moins d'en faire le convoi funèbre d'une classe politique qui, toute ensemble, a réussi un pari impossible : faire fonctionner une démocratie sans peuple. C’est ainsi. Chacun à notre tour nous avons sans doute tenté une ou plusieurs fois d’échapper à ce sort. Depuis dimanche, 52,5 % des Français nous ont rappelé qu’il était trop tard : l'équipage roule depuis longtemps sur les rails de l'indifférence.

Les adultes ne croient plus au Père Noël, ils votent (Pierre Desproges).

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Marc Guidoni